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Un consortium franco-belge emmené par la Compagnie nationale du Rhône vient d’être missionné par l’Autorité du canal de Panama pour lancer une vaste étude sur la modernisation des écluses historiques.

De quoi agacer Donald Trump, ou pas… Moderniser les écluses historiques, les adapter au changement climatique et au passage quotidien de dizaines de porte-conteneurs : ce sont les objectifs d’une vaste étude tout juste commandée par l’Autorité du canal de Panama et attribuée à un consortium franco-belge emmené par la Compagnie nationale du Rhône (CNR) avec le bureau d’ingénierie IMDC (International Marime & Dredging Consultant), le centre d’expertise FHR (Flanders Hydraulics Research) ainsi que l’Université de Ghent.

D’une durée de deux ans, cette étude vise à évaluer et à optimiser les écluses les plus anciennes, lancées à l’inauguration de ce canal de 80 kilomètres par les Etats-Unis en 1914. Et ainsi, contribuer à « réduire les temps de passage des navires (aujourd’hui d’environ 8 heures, ndlr) et rendre le trafic des bateaux transitant par l’ouvrage moins sensible aux effets du dérèglement climatique », indique la compagnie lyonnaise, qui exploite par ailleurs 19 barrages sur le Rhône, mais aussi 47 centrales hydroélectriques et 13.000 hectares de foncier terrestre.

De 38 à 22 porte-conteneurs par jour en raison de la sécheresse

Ici, l’étude testera des modèles hydrauliques « qui simuleront, entre autres, les courants de densité générés par le mélange entre l’eau douce issue du lac Gatun et l’eau salée arrivant des océans Atlantique et Pacifique », précise la CNR. «  L’approche inclura ainsi des modèles numériques et plusieurs modèles réduits physiques », ajoute la compagnie lyonnaise, qui nous précise ne pas pouvoir livrer le coût de ce programme.

L’enjeu climatique est immense pour ce canal alimenté en eau douce par deux lacs artificiels adjacents et qui a vu transiter en moyenne chaque jour 22 porte-conteneurs en 2024, contre 38 jusqu’alors. L’année dernière a en effet été marquée par une forte sécheresse et l’abaissement des niveaux d’eau, engendrant des interruptions de trafic pour ce couloir concentrant 6% du commerce maritime mondial. Une situation qui a conduit à une baisse de 20% du nombre de navires et de 17% du volume de marchandises transportées sur un an. Et ce, malgré l’élargissement du canal et le lancement de nouvelles écluses en 2016, pour lesquelles ce même consortium porté par CNR avait déjà été mobilisé entre 2002 et 2012.

Sous la pression des Etats-Unis

Cette diminution du trafic n’a pas empêché les revenus du canal d’augmenter. L’Autorité a en effet enregistré, sur l’exercice écoulé, un chiffre d’affaires record de 4,986 milliards de dollars, porté à 80% par les revenus des péages, le reste provenant de la vente de services maritimes et d’énergies.

Les responsables du canal s’attendent même à une hausse des recettes en 2025, avec environ 5,623 milliards de dollars, quelque 13.900 navires et 520 millions de tonnes de marchandises transportées.

Reste à savoir quelle sera l’attitude de la future administration américaine. Ces derniers jours, la pression est montée d’un cran autour de ce passage très convoité. Donald Trump a menacé de prendre le contrôle du canal en raison de ses « prix exorbitants », couplés aux enjeux militaires face à la Chine. Entre provocation et menace sérieuse, le nouveau président des Etats a lancé, mardi 7 janvier : « Ils ne nous traitent pas de manière juste. Ils font payer nos navires davantage que les navires d’autres pays ».

Interrogé sur un éventuel recours aux forces armées pour annexer le canal de Panama et le Groenland, le futur président a tout bonnement refusé de l’exclure. « Je ne peux pas vous l’assurer, sur aucun des deux », a déclaré Donald Trump.

La souveraineté du Panama sur ce canal « n’est pas négociable », lui a répondu le ministre des Affaires étrangères panaméen, Javier Martinez-Acha. Depuis 1999, cet État d’Amérique centrale dispose du contrôle du canal, à l’issue d’un accord avec l’ancien président américain Jimmy Carter en 1977. Les revenus de ce couloir hautement stratégique représentent 6% du PIB du pays, avec près de 28 milliards de dollars versés au Trésor panaméen depuis 2000.

-Emma Rodot